Deux
groupuscules néonazis cherchent à se profiler sur la scène
politique
QU:Le Temps, 2001-07-07
sécurité
· Le rapport 2000 sur la protection de l'Etat relève une
nette augmentation du noyau dur des extrémistes de droite en
Suisse. Parmi eux, D.M. et Sacha Kunz cherchent à se
positionner sur l'échiquier politique
Valérie
de Graffenried
Entre
800 et 900 individus contre environ 700 en 1999: le noyau
dur des skinheads suisses a encore pris de l'ampleur l'année
dernière. 54 des 134 incidents liés à l'extrême
droite enregistrés
en 2000 (41 en1999) étaient accompagnés de violences
physiques, stipule encore le nouveau rapport sur la protection de
l'Etat rendu public vendredi par l'Office fédéral de la
police
(OFP). Si la scène d'extrême droite est relativement restreinte
et
essentiellement liée à des réseaux idéologiques
en Suisse
romande, elle est par contre toujours plus influente en Suisse
alémanique. A quelques jours du 1er Août - celui de l'année
dernière est resté dans les annales en raison des skinheads
venus en grand nombre chahuter Kaspar Villiger sur le Grütli -,
l'occasion est toute trouvée pour faire le point sur les deux
groupes d'extrême droite qui cherchent actuellement à se
profiler
sur l'échiquier politique. Petits de par le nombre de leurs
membres (une cinquantaine chacun) en comparaison avec les
deux organisations faîtières que sont les Schweizerische
Hammerskins ou le groupuscule Blood & Honour, le Partei
National Schweiz (PNS) ainsi que le Partei National Orientierter
Schweizer (PNOS) laissent toutefois entrevoir - ne serait-ce que
par leur intitulé - des ambitions plus politiquement ciblées.
Antenne
du NPD allemand
Bien que
théoriquement dissous, le PNS entretient, de source
policière, des contacts toujours plus étroits avec le
NPD, parti
néonazi allemand, pour lui servir d'antenne suisse. D.M.,
24 ans et d'origine italienne, a fondé son mouvement le 6 avril
dernier à Berne. Aussitôt licencié de la radio alternative
RaBe
pour laquelle il travaillait, D.M. a par la suite fait parler de
lui pour avoir prononcé des propos ambigus sur le
national-socialisme allemand, qui lui ont valu une plainte de la
Fondation contre le racisme et l'antisémitisme. Il est par ailleurs
poursuivi par la justice zurichoise pour avoir escroqué via trois
sociétés de petits crédits plus de 1300 personnes
pour un total
d'environ 270 000 francs. Tout aussi jeune - «mais 25-26 ans,
c'est déjà vieux pour des néonazis», précise
Jürg Bühler,
suppléant du chef du service de prévention et d'analyse
au sein
de l'OFP -, Sacha Kunz, ancienne tête pensante du groupe
Blood & Honour, a lui fondé le 1er septembre dernier à
Liestal
(BL) le PNOS. «Ces deux groupes ont effectivement l'ambition
de se politiser davantage», confirme Jürg Bühler. «Et
le PNOS a
d'ailleurs un site Internet hébergé par un serveur allemand,
dans
lequel il diffuse un programme politique. Mais comme cette
tendance est relativement récente, elle ne figure pas encore
dans le rapport 2000.» Et de citer encore le cas d'un jeune
skinhead qui a choisi il y a plusieurs mois de se porter candidat
aux élections communales d'Ittigen (BE). «Mais il était
seul et ne
représentait pas un groupe particulier.» Rappelons qu'en
septembre 2000, le Bernois Roger Wüthrich, président du
cercle
d'extrême droite Avalon, avait été jusqu'à
faire part de ses
motivations de créer une «section skinheads» au sein
de l'UDC
à Urs von Däniken, alors chef de la police fédérale,
en lui
présentant une brochure de 36 pages. La tentative de politisation
de son cercle a été rapidement avortée, notamment
par le fait
qu'il n'avait jamais été question pour l'UDC de faire
entrer Avalon
dans ses rangs.
Médiatisation
Plus médiatisé
que D.M. , Sacha Kunz ou Roger
Wüthrich, le Thurgovien Pascal Lobsiger - il a été
mitraillé par les
objectifs des photographes pour avoir drainé l'année dernière
une bonne centaine de skinheads sur le Grütli dans le but de
venir perturber l'allocution du conseiller fédéral Kaspar
Villiger -
est un des fondateurs de l'organisation faîtière des Hammerskins
et celui de la récente Organisation de promotion nationale.
Réputé pour sa violence auprès des services juridiques
- il a
notamment écopé de douze mois de prison ferme en 1995
pour
avoir passé des festivaliers tiers-mondistes à tabac -
Lobsiger
nourrirait, selon le Blick du 6 juillet, des ambitions européennes.
Lors d'une réunion de skinheads qui s'est tenue l'année
dernière
à Berlin, il aurait fait part de ses intentions de diriger un
mouvement néonazi européen. Une information que l'OFP
n'est
pas en mesure de confirmer. ·